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GEORGES DUDOGNON

La photographie autrement


Témoin actif de la dernière moitié du XXe siècle, Georges Dudognon (1922-2001) a écrit en images les pages d’une période cruciale en tous points, celle des trente glorieuses. Assimilé au courant de la photographie humaniste, Dudognon a saisi les instants privilégiés de cette époque, infiltrant tous les milieux, des clochards aux stars internationales, pour de nombreux supports : Samedi Soir, Combat, Jours de France, Paris Match, ELLE, Science et Vie... Il a également été témoin de l'essor industriel et technologique, photographiant les grands travaux, nucléaire, pétrole, automobile... Contemporain et, disons-le, rival amical de Robert Doisneau, ami d'Édouard Boubat, Georges Dudognon s'est distingué de ses collègues par un ton photographique plus militant inspiré par son passé politique radicalement à gauche. D'origine modeste, ouvrier des chantiers naval de sa ville natale, La Rochelle, il fut interné dans un camp politique en 1942 duquel il s'évada pour rejoindre la Résistance et les "imprimeurs de l'ombre", journalistes clandestins qui lui ont appris les bases de son futur métier.

 

Saint-Germain-des-Prés

 

Envoyé un jour de 1945 en reportage à la rencontre d’hypothétiques starlettes de cabarets, il y découvre un monde trépidant, unique et enfin libre, peuplé de ceux que la presse bien pensante surnommait les rats des caves. Il y restera deux ans, travaillant jour et nuit pour témoigner de la vitalité créative de ce petit monde rebelle, se serrant toutes les nuits au Bar Vert, au Tabou, à la La Rose rouge, au club Le Vieux Colombier, au Club Saint-Germain ou au Méphisto. Les plus assidus du quartier furent ses amis. Juliette Gréco, Daniel Gélin, Boris Vian, Philippe Clay, Pierre Brasseur, Pierre Prévert mais également de nombreuses stars américaines et anglaises, Charlie Chaplin, Richard Widmark, le duo Bogart-Bacall, Orson Welles, Marlène Dietrich, Greta Garbo, entre autres, qui faisaient de fréquentes incursions dans les fameuses caves transformées en cabarets où le Be-bop, le jazz et la chanson française d’avant-garde enflammaient une jeunesse qui avait retenu son frein pendant la guerre.

 

De Saint-Germain à Saint-Tropez

 

Dès 1949, Georges Dudognon sent que "les rats sont devenus des requins". Il effectue des migrations estivales vers la Cote d'Azur, guidé par ses amis Daniel Gélin et Roger Vadim, photographiant les stars du Festival de Cannes, les jazzmen d'Antibes et de nombreux artistes pour ELLE. Son fameux portrait de Françoise Sagan à Saint-Tropez est l'emblème de cette époque qui a vu toute une génération passer des caves obscures au soleil brûlant de la Riviera.

 

Le miroir des Trente glorieuses

 

Si la France a vécu une période faste et active, elle ne le fut pas pour tout le monde. De nombreux laissés pour compte n'ont pas eu droit aux pages des magazines. Georges Dudognon, s'est fait un point d'honneur à les rencontrer, rapportant et même publiant un témoignage inestimable et rare. De l'abbé Pierre aux gitans de la porte de Saint-Ouen, des bidonvilles de la ceinture parisienne aux clochards de « La Mouff », il a vécu avec eux et a milité avec l'arme de paix qu'il a choisie, son appareil photographique.

 

Georges Dudognon intègre le sérail des photographes humanistes en 2006, à l’occasion de l’exposition « La Photographie humaniste, autour d’Izis, Boubat, Brassaï, Doisneau, Ronis… » à la Bibliothèque nationale de France.

En 2010, une photographie de Georges Dudognon représentant Greta Garbo, acquise par le SFOMA de San Francisco, est choisie comme emblème de l’exposition internationale « Exposed, Voyeurism, Surveillance and the Camera » par la Tate Modern de Londres. Il participe depuis à de nombreuses expositions thématiques (« Prévert, Paris la belle » en 2008 à la Mairie de Paris, Django Reinhardt, au Musée de la musique, 2012 / 2013, à la Cité de la musique).

En 2013, l'ouvrage "De Saint-Germain-des-Prés à Saint-Tropez", aux éditions Flammarion, lui est consacré. Commentaires de Juliette Gréco, texte de Thierry de Beaumont.

En juillet 2014, la photographie de Greta Garbo au Club Saint-Germain (ca 1952) est choisie par Christian Lacroix, commissaire de l'exposition « L'Arlésienne » aux Rencontres photographiques d'Arles.

L'intégralité de son œuvre, scannée et classée depuis sa disparition en 2001, est aujourd'hui reconnue comme majeure. 

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